Dans un autre article, nous vous parlions de la technique d’aération des vins, notamment grâce à l’art du carafage. Cette opération, destinée à oxygéner le vin pour l’ouvrir et permettre à son bouquet (le panel aromatique) de s’épanouir pour mieux s’exprimer, est essentiellement réservée aux vins jeunes. À l’inverse, la décantation va permettre de protéger un millésime plus âgé de l’agression brutale de l’oxygène tout en le séparant des dépôts éventuels qui auraient pu s’accumuler au fil des années. Une technique complètement différente donc, mais hautement délicate car un vin vieux, c’est aussi et surtout un vin fragile.
Qu’est-ce que la décantation ?
Si l’on se réfère à la définition du Petit Larousse (oui, un dictionnaire n’est pas et ne sera jamais quelque chose de désuet), la décantation consiste à « débarrasser un liquide de ses impuretés en les laissant se déposer au fond ». D’un point de vue plus œnologique, il s’agit de séparer le vin des dépôts qu’il contient et qui gâcheraient la dégustation.
Même s’il est des plus désagréables en bouche, la présence d’un dépôt dans un vin vieux est tout à fait normale. Car le vin est un produit vivant qui évolue au fil du temps. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, cela concerne aussi bien les vins rouges que les vins blancs…
Le dépôt dans les vins blancs
Que le vin blanc soit sec ou doux, lorsqu’il est entreposé un certain temps à une température fraîche, un de ses composants naturels va se solidifier et former des cristaux (pour les plus chimistes, il s’agit précisément de la précipitation de l’acide tartrique favorisée par une chute de température). On verra alors apparaître un dépôt blanc dans le fond de la bouteille.
Le dépôt dans les vins rouges
Pour un vin rouge, en vieillissant, ce sont les tanins et les molécules de couleurs qui vont se solidifier petit à petit jusqu’à former là encore ce dépôt, ou sédiment, parfois retrouvé collé aux parois de la bouteille.
Vins blancs ou vins rouges, dans les deux cas de figure, cela ne doit jamais vous faire douter de la qualité de votre bouteille. Au contraire, c’est bien le signe que votre vin en a (de la bouteille 😉).
Comment décanter un vin vieux ?
On pourrait se dire que la décantation est un procédé bête comme chou. On prend la bouteille, on en verse le contenu dans un autre récipient et hop ! le tour est joué, il n’y a plus qu’à laisser le fameux dépôt se déposer dans le fond. Oui… mais en fait, non. Car ça serait oublier la fragilité des vins vieux qui risquent de très mal réagir à l’oxygénation inévitable de la manipulation. Et en plus, en réalisant ce geste trop rapidement, les particules de dépôt se remettraient en suspension et il faudrait plusieurs heures avant qu’elles ne se redéposent.
En réalité, il faut en effet transvaser le vin, mais avec une extrême délicatesse doublée de minutie pour que le dépôt reste dans la bouteille d’origine. Autre point des plus importants : la carafe où va être versé le vin ne doit pas avoir n’importe quelle forme (quand on vous dit que la dégustation du vin est tout un art !) : pour limiter au maximum l’oxygénation de votre breuvage précieux, il est essentiel que votre carafe soit étroite et haute. Cela laissera beaucoup moins de place à l’air et ce dernier, de fait, rentrera peu en contact avec le vin. Idéalement, il faudrait même reboucher la carafe aussitôt le vin versé dedans. Et dans tous les cas, si le carafage des vins jeunes se fait de préférence 2 heures avant la dégustation, la décantation, elle, doit être opérée le plus tard possible. Car un vin vieux qui prendrait l’air, aussi robuste qu’il soit, peut bien perdre toute sa saveur en 10 petites minutes…
Enfin, n’oubliez pas qu’un vin, jeune ou vieux, carafé ou décanté, n’est jamais aussi délicieux que lorsqu’il est bu avec modération. L’art du vin, c’est également l’art de faire la distinction entre une consommation de gourmand, et une consommation de gourmet !
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION