La dysmorphophobie, voilà un terme bien barbare pour définir un trouble du comportement que pourtant notre société actuelle n’a de cesse de favoriser en laissant planer l’idée fausse et encore plus que fausse, trompeuse, que la norme se trouve dans la beauté, et même encore plus loin que la beauté, dans l’absence totale de « défaut », ou tout ce qui pourrait être jugé comme tel. Et c’est bien ce contexte actuel qui est le germe de tous les complexes dont souffrent quotidiennement de nombreuses personnes insatisfaites de leur physique car le miroir ne leur renvoie pas cette image des magazines. Des complexes qui peuvent pousser au repli sur soi. Des complexes qui peuvent pousser au retrait social. Des complexes qui peuvent évoluer en véritables obsessions. Des complexes qui peuvent aller jusqu’à générer un dégoût profond de soi-même. Des complexes qui peuvent entraîner de lourdes conséquences physiques et psychologiques. Des complexes aussi douloureux qu’obsessionnels et qui sont l’expression de la dysmorphophobie.
Quels sont les symptômes de la dysmorphophobie ?
Tant pour la population que pour les professionnels de la santé, la dysmorphophobie est un trouble mal connu et de fait, peu reconnu. Et c’est bien là tout son aspect vicieux car la personne touchée elle-même se sait rarement atteinte. Totalement absorbée par son apparence et son physique, elle ne s’aperçoit que trop tard (avec l’apparition d’autres troubles du comportement obsessionnels) que, peut-être, elle souffre d’autre chose que de son image mais bien d’une maladie psychique, une maladie qui la renferme littéralement dans un cercle fait de honte d’elle-même et de culpabilité d’exister. La vie d’une personne dysmorphophobique ne tournera autour que d’une seule chose : chercher son reflet non pas pour se mirer mais pour scruter le moindre défaut comme un fauve guette sa proie, ou à l’inverse, à éviter son image coûte que coûte, quitte à faire disparaître tous les miroirs de son intérieur et à rester loin de chaque surface réfléchissante comme les vitrines des magasins qui ne sont que des rappels perpétuels de son ignominie. C’est ainsi que le cloisonnement sur soi-même se fait aussi naturellement que sournoisement, et associé à un isolement social quasi inévitable, le dysmorphophobique cultivera de plus en plus des pensées négatives pour ne pas dire carrément noires, avec bien souvent des idées suicidaires à la clé. Il n’est pas rare également qu’une personne atteinte de dysmorphophobie ait recours de façon répétée à la chirurgie esthétique, un acte qu’elle espérera salvateur toujours, mais qui la décevra à chaque fois en ne faisant que stimuler son obsession pour une perfection aussi impossible qu’irréelle.
Comment se sortir de la dysmorphophobie ?
Parmi les personnes reconnues comme dysmorphophobiques, 70 % vivent seules tant il leur est impossible d’avoir et d’entretenir des relations stables et de qualité. 60 % n’ont pas d’emploi tant leur repli social est profond. 70 % souffrent de dépression et dans ces 70 %, 20 % ont déjà tenté un acte suicidaire. Et c’est sans compter sur les autres « dangers ». Car les personnes touchées par la dysmorphophobie sont les proies idéales des pervers narcissiques de plus en plus en puissance. C’est dire toute l’importance de leur apporter une aide et un soin sérieux. La prise en charge psychologique semble inévitable et absolument nécessaire, avec une large option placée dans la thérapie comportementale et cognitive, une thérapie qui a déjà largement fait ses preuves sur des problèmes divers de TOC (Troubles Obsessionnels Compulsifs). Parallèlement à ces séances, il n’est pas rare qu’un antidépresseur par inhibition de la recapture de la sérotonine soit prescrit, comme béquille à la psychothérapie. Mais en complément, d’autres voies peuvent être intéressantes : la pratique du yoga, de la danse libre, ou encore de toute forme d’art qui aura une visée cathartique d’extériorisation.
Comment aider une personne dysmorphophobique ?
Soutenir une personne de son entourage souffrant de dysmorphophobie n’est pas une mince affaire. Et à vouloir faire bien et rassurer, il est aisé de se rendre compte que l’on fait en réalité l’inverse. Une chose qu’il faut bien comprendre, c’est qu’il est inutile de demander à la personne de relativiser, tout comme il est inutile de lui dire qu’elle se trompe, que non, son nez n’est pas une patate, que non, ses yeux ne sont pas trop éloignés l’un de l’autre, que non, son visage n’est pas atroce, et que non, son corps n’est pas tout simplement ignoble. Plutôt que de chercher à rassurer un dysmorphophobique sur ses défauts (chose impossible), essayez plutôt de le complimenter sur ses qualités, aussi bien physiques que morales. L’idée, que la personne retrouve cette faculté de s’envisager dans sa globalité, dans son tout. Mais attention à ne pas trop en faire car elle verrait alors dans cette abondance d’éloges une attestation supplémentaire de ses défauts insupportables.